Formulaires de médicaments d’exception et échographies pour infiltration.
La cour d’appel confirme que ces services non assurés peuvent être facturés

Le 1er mars 2022, la Cour d’appel du Québec a reconnu que les membres de la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec (« FMOQ ») sont en droit d’exiger des frais auprès des personnes assurées lorsqu’ils remplissent les formulaires de médicaments d’exception et lorsqu’ils utilisent un appareil d’échographie pour faire une infiltration.

L’arrêt Fédération des médecins omnipraticiens du Québec c. Régie de l’assurance maladie du Québec, C.A. (Québec) No 200-09-010195-201 accueille en partie la demande de jugement déclaratoire introduite par la FMOQ. La demande visait à trancher le différend qui opposait la FMOQ et la RAMQ quant au droit de ses membres d’exiger certains frais des personnes assurées pour des services rendus à l’occasion d’une visite médicale.

La Cour d’appel reconnaît que des frais pourront être exigés pour remplir un formulaire d’approbation d’un médicament d’exception.

La Cour d’appel a également reconnu que l’échographie qui sert à effectuer une infiltration est un service non considéré comme assuré lorsqu’elle est effectuée en cabinet privé par un médecin omnipraticien. Un tel service n’est pas couvert par le régime public et ce, même lorsqu’il est dispensé avant, pendant ou après un autre service qui, lui, est assuré, comme une infiltration. La Cour a expressément rejeté « la logique selon laquelle tout service, quel qu’il soit, dispensé dans le cadre du processus menant à la dispensation complète, entière et finale d’un service requis au point de vue médical est nécessairement lui-même un service assuré, ou encore un service engagé pour la dispensation d’un service assuré, qui ne peut donc être facturé au patient ». La Cour a donc reconnu que les membres de la FMOQ qui possèdent un appareil d’échographie et qui s’en servent afin d’effectuer des infiltrations dans leur cabinet peuvent facturer pour cette partie du service dispensé.

Cela dit, la Cour mentionne que les médecins devraient informer leurs patients qu’ils peuvent obtenir une infiltration dans un établissement public sans aucun frais supplémentaire pour le volet du guidage échographique.

La Cour d’appel a refusé de se prononcer sur le droit des membres de la FMOQ d’exiger des frais pour des billets d’absence ou diverses autres attestations requises pour être remises à des tiers. À ce sujet, la Cour a conclu que chaque cas devait être analysé en fonction des faits pertinents afin de déterminer la légalité des frais. Pour la même raison, la Cour a également refusé de déclarer que les membres de la FMOQ peuvent facturer des frais pour la photocopie ou le résumé de dossier, lorsqu’ils ne sont pas requis pour donner suite à une recommandation du médecin traitant. La Cour d’appel reconnaît donc implicitement qu’en fonction des circonstances, des frais pourraient être valablement exigés pour émettre des billets, des attestations, des photocopies ou des résumés de dossier. Nous vous invitons à contacter la FMOQ afin d’obtenir plus de précisions sur les circonstances dans lesquels de tels frais peuvent être exigés.

Nous notons pour terminer que la Cour d’appel souligne que « le tissu législatif et réglementaire propre au régime d’assurance maladie québécois et à la rémunération des professionnels de la santé n’est pas d’une limpidité exemplaire », que « [s]on application à la réalité médicale sur le terrain pose des difficultés légitimes de coordination à tous les échelons de l’appareil étatique » et que les ententes de rémunération ne règlent pas toujours toutes les difficultés d’application qui peuvent se révéler sur le terrain, après coup. Ces commentaires confirment que des erreurs de bonne foi surviennent nécessairement dans la facturation, ce dont la RAMQ devrait prendre acte lorsqu’elle exerce ses activités de contrôle auprès des médecins, selon la FMOQ.

Nous ne savons pas à ce stade-ci si la RAMQ et le gouvernement entendent porter ce jugement à l’attention de la cour suprême.  Quoi qu’il en soit, le jugement de la cour d’appel est d’application immédiate.

Rappelons en terminant que les tarifs associés à la facturation des services non assurés doivent être affichés à la vue du public dans la salle d’attente de la clinique médicale.  La FMOQ verra à mettre à jour la grille qu’elle propose à ses membres en fonction du jugement rendu.  Dans l’intervalle, les médecins peuvent utiliser un support papier additionnel dans leur salle d’attente afin d’identifier et de tarifer, selon ce qu’ils croient être juste et raisonnable, les frais associés au remplissage du formulaire pour les médicaments d’exception et associés à l’utilisation d’un appareil d’échographie pour effectuer une infiltration.  Au sujet des infiltrations, il serait sage aussi d’indiquer sur l’affiche que « les patients peuvent obtenir une infiltration dans un établissement public sans aucun frais supplémentaire pour l’utilisation d’un appareil d’échographie ».  Il serait également opportun, afin de respecter la Loi, d’ajouter sur cette affiche la mention relative au possibilité de recours d’un patient : « Le patient qui estime que les sommes qui lui sont réclamées après le 6 décembre 2015 visent des services assurés au sens de la Loi sur l’assurance maladie ou des frais engagés aux fins de la dispensation de ceux-ci peut, par écrit dans les cinq ans suivant la date du paiement, en réclamer le remboursement à la Régie de l’assurance maladie du Québec, qui lui remboursera alors le montant, lorsqu’elle est d’avis que sa facturation n’était pas permise, et récupérera ce montant du professionnel ou du tiers en cause. »